De la gare au musée d’Orsay, histoire d’une métamorphose
« La gare est superbe et a l'air d'un palais des Beaux-Arts… », écrivait le peintre français Édouard Detaille en 1900. Quatre-vingt-six ans plus tard, sa prophétie est devenue réalité.
Grâce à son architecture unique, qui participe à la magie de l’expérience, le bâtiment est la première « œuvre » des collections du musée d’Orsay.
Une gare pour l’exposition universelle
Situé en plein cœur de Paris, sur la rive gauche de la Seine, le musée est construit sur l’emplacement de l’ancien palais d’Orsay. Edifié à partir de 1810, ce palais accueille successivement le Conseil d'État et la Cour des comptes. Incendié en 1871 pendant la Commune de Paris, il est ensuite laissé à l'état de ruine. C’est sur ce site abandonné que l’architecte français Victor Laloux est missionné pour construire le nouveau terminus de la Compagnie des chemins de fer d’Orléans. L’enjeu est d’importance : l’enceinte ferroviaire doit notamment accueillir les visiteurs de l’Exposition universelle de 1900.
Inaugurée le 14 juillet 1900, la toute nouvelle gare d’Orsay bénéficie des dernières innovations techniques : traction électrique des trains, tapis remonte-bagages, ascenseurs… À l’époque, le bâtiment abrite également le luxueux hôtel du Palais d’Orsay. On en retrouve encore aujourd’hui l’héritage dans le restaurant, le fumoir et la salle des fêtes du musée.
La gare est cependant rapidement dépassée par l’évolution du chemin de fer. Sa fréquentation se limite aux trains de banlieue. A la Libération, en 1945, elle est utilisée pour accueillir des prisonniers et des déportés de guerre. En 1961, elle est même à vendre, sans pour autant trouver preneur.
Tour à tour décor de cinéma – en 1961, Orson Welles y tournera le Procès, adapté de Kafka -, parking, stand de tir, salle de ventes… le lieu connait des destins divers. En 1958, le général de Gaulle y annoncera son retour en politique, et le chapiteau de la compagnie théâtrale Renaud-Barrault s’y installera pendant près de dix ans.
L’avenir de ce monument, classé à l’inventaire des Monuments historiques en 1978, suscite de vifs débats. Plusieurs projets de réaménagement voient le jour. À la fin des années 1970, le gouvernement tranche en faveur de la création d’un lieu culturel dédié aux arts de la seconde moitié du XIXe siècle. La transformation en musée est confiée au cabinet A.C.T. Architecture et à la célèbre architecte et designer italienne Gae Aulenti pour son aménagement intérieur.
Après quelques années de travaux, le nouvel édifice est inauguré le 1er décembre 1986 par le Président de la République François Mitterrand. Une semaine plus tard, les premiers visiteurs découvrent les collections.
Le bâtiment du musée de l'Orangerie
Construit en un temps record en 1852 à la demande de l’empereur Napoléon III, le bâtiment pensé par l’architecte Firmin Bourgeois abrite chaque hiver les orangers du jardin du Palais des Tuileries.
Après la chute de l’Empire en 1870, l’Orangerie est rattachée au Domaine de l’État, qui l’affecte au sous-secrétariat d’État aux Beaux-Arts en 1921 avec l’ambition d’y exposer les artistes vivants.
Ancien président du Conseil, Georges Clemenceau propose d’installer à l’Orangerie le grand ensemble des Nymphéas que Claude Monet avait offert à l’État au lendemain de l’armistice de 1918.
La donation est formalisée en 1922. Le « musée Claude Monet » est inauguré par Clemenceau le 17 mai 1927, quelques mois après la mort de l’artiste. D’abord rattaché aux Musées de France, le musée national de l’Orangerie des Tuileries est intégré au musée du Louvre, en 1930 et accueille durant trois décennies des expositions temporaires.
Premier musée d’art français moderne
L’acquisition par l’État des collections Jean Walter, en 1959, et Paul Guillaume, en 1963, donne un élan définitif au musée de l’Orangerie. Le lieu se transforme en « Premier musée d’art français moderne » ouvert au public, selon le souhait du collectionneur Paul Guillaume. L’Orangerie devient alors un musée national.
Plus tard, entre 2000 et 2006, son architecture est entièrement repensée sous l’impulsion de l’architecte Olivier Brochet et de Pierre Georgel, l’ancien directeur du musée.
Dernière étape de cette mue au long cours, le musée de l’Orangerie rejoint le musée d’Orsay en 2010 au sein de l’Établissement public des musées d’Orsay et de l’Orangerie.